Prothèse d'épaule
La prothèse d'épaule est la solution chirurgicale pour traiter une arthrose invalidante de l'épaule appelée aussi omarthrose.
Pr Eric Roulot / Chirurgie orthopédique / Chirurgie de l'épaule / Prothèse
La pose d’une prothèse d’épaule reste la seule solution envisageable quand l’arthrose de l’épaule appelée omarthrose devient trop douloureuse et handicapante. Cette chirurgie de l’épaule consiste au remplacement des deux surfaces articulaires touchées par la maladie : la tête de l’humérus et la glène de l’omoplate par deux pièces prothétiques qui s’articulent l’une sur l’autre.
Ces deux pièces sont en métal et recouvertes au niveau de la surface de glissement par du polyéthylène qui est un composant plastique très résistant. Chaque pièce métallique est fixée à l’os (humérus et omoplate) qui doit être de bonne qualité pour que la fixation spontanée ou par du ciment soit solide et durable.
Quand une prothèse d'épaule devient-elle nécessaire ?
Si les matériaux des prothèses d’épaules sont très bien tolérés par l’organisme sans rejet, les deux pièces doivent par contre être fixées à l’os chacune d’un côté. Pour avoir un bon ancrage, cette fixation est compliquée car elle nécessite une surface de contact large et un os de bonne qualité.
Avec le temps, la zone de contact entre l’os et la pièce prothétique a tendance à se fragiliser car l’os est contrairement à la prothèse un tissu vivant qui évolue avec le temps. Il n’a pas la même élasticité que la pièce prothétique.
D’autre part, la durée de vie d’une prothèse d’épaule n’est pas éternelle. Avec le temps et l’usure et en général après de nombreuses années, Il se produit un descellement de la prothèse qui impose son changement. Celui-ci n’étant pas simple, il est important d’essayer de l’éviter en retardant le plus possible une seconde chirurgie prothétique.
L’âge de mise en place de la prothèse d’épaule est donc essentiel. Dans l’idéal, il faut mettre cette prothèse suffisamment tard dans la vie du patient pour ne pas avoir à la changer. Néanmoins, il faut le faire quand l’os est encore de bonne qualité pour avoir une bonne fixation de la prothèse. On peut donc retarder au maximum l’intervention, mais uniquement si le stock osseux reste correct et que l’arthrose de l’épaule ne l’a pas trop usé.
La prothèse anatomique
Une prothèse totale anatomique de l’épaule reproduit l’anatomie de l’articulation originelle. C’est une grosse tête humérale en face d’une petite articulation de l’omoplate. Elle est entourée d’une coiffe des rotateurs de bonne qualité pour maintenir la cohésion de l’ensemble.
La prothèse anatomique est techniquement plus difficile à mettre en place mais reste la meilleure alternative car sollicite moins la fixation des pièces prothétiques.
La prothèse inversée
La pose d’une prothèse inversée de l’épaule reste la seule alternative quand la coiffe est détruite. C’est souvent le cas, la rupture de coiffe étant l’une des principales causes d’omarthrose. L’absence de coiffe pour stabiliser les deux pièces prothétiques l’une avec l’autre est remplacée par un emboitement de la prothèse.
La sphère que constitue normalement la tête humérale est posée en position inversée sur l’omoplate. Cela permet de remplacer la tête humérale par un réceptacle arrondi et d’emboiter ainsi les deux pièces l’une dans l’autre. Elles sont ainsi mobiles en rotation mais sans nécessiter la stabilisation musculaire comme c’est le cas pour une articulation anatomique non emboitée.
La prothèse unipolaire
La prothèse unipolaire est une solution de sauvetage parfois nécessaire quand la fixation de la pièce sur l’omoplate n’est pas faisable ou pas souhaitable. Elle a l’avantage d’être d’une grande simplicité. Mais en changeant une seule des deux facettes articulaires, elle soulage bien moins la douleur à l’épaule.
Une opération faite par un abord chirurgical conventionnel (à ciel ouvert)
Le principe de la prothèse d’épaule consiste à remplacer les deux surfaces articulaires abimées ou détruites par l’arthrose par une pièce métallique ou en polyéthylène que l’on positionne dans une cavité en forme de cône préparée dans l’os. Chaque pièce est fixée à l’os par consolidation ou à l’aide de ciment chirurgical.
Déroulement d'une arthroplastie totale d'épaule
L’intervention chirurgicale se déroule sous anesthésie générale à l’occasion d’une hospitalisation courte. Celle-ci vise à surveiller l’absence de complications immédiates. La sortie du patient est effectuée vers le 5ème jour et peut se faire en centre de rééducation ou à domicile.
Après l’opération, il faut garder l’épaule immobilisée par un écharpe de soutien avec une position coude au corps.
La rééducation après une arthroplastie de l’épaule est possible dès le premier jour post opératoire en prenant soin de respecter les consignes du chirurgien. Il faut en principe ne pas faire de mouvements qui puissent gêner la bonne cicatrisation des structures tendineuses suturées, en particulier la rotation externe de l’épaule.
Technique chirurgicale
L’incision est antérieure, dans l’axe d’une bretelle de soutien-gorge ou supérieure en épaulette. L’articulation de l’épaule est ensuite abordée pour permettre la réalisation des résections osseuses nécessaires pour préparer l’os à l’ancrage de la prothèse. L’os doit être solide pour un ancrage de qualité. On prépare alors l’os de chaque côté (humérus et omoplate) en y creusant un réceptacle pour les pièces prothétiques.
La fixation des pièces se fait par consolidation osseuse de l’os sur la prothèse ou par ancrage à l’aide de ciment ou de vis.
Une fois les pièces prothétiques positionnées, on réduit l’articulation en repositionnant les deux pièces l’une en face de l’autre et l’on referme l’articulation puis on suture les formations tendino-musculaires qu’il a été nécessaire de sectionner pour permettre l’abord articulaire.
Pour confirmer le bon positionnement de la prothèse, une hémostase rigoureuse avant fermeture et un contrôle radiographique post opératoire sont nécessaires.
Temps de récupération et convalescence après l'opération
Les temps de récupération sont longs et en moyenne de trois mois. Une immobilisation après l’opération de l’épaule vise uniquement à soulager la douleur post opératoire. La rééducation peut être rapidement entreprise car la prothèse est d’emblée à son maximum de fixation. Il faut simplement respecter les temps de cicatrisation des sutures musculaires réalisées pour effectuer l’abord chirurgical.
La prothèse de l’épaule soulage bien les douleurs. Sur le plan de la mobilité, les résultats sont très variables en fonction du terrain. La prothèse n’ayant pas de moteur, ceux sont les muscles du patient opéré qui vont faire le travail.
Exercices de rééducation et reprise de la vie quotidienne
Les exercices de rééducation sont un travail important à effectuer après mise en place de la prothèse. Si celle-ci soulage bien les douleurs par la suppression des surfaces de glissements inadaptées, la prothèse doit être motorisée par les muscles du patient. Ceux-ci sont en général assez altérés par l’immobilité imposée par les douleurs avant intervention. Il convient donc de leur redonner par la rééducation une fonction correcte.
Ce travail avec un kinésithérapeute doit donc être poursuivi tant qu’il permet un progrès.
La mobilité de l’épaule peut dans le meilleur des cas être normale. Cependant la plupart des patients n’arrivent pas à récupérer toute l’amplitude normale d’une épaule. La récupération est en général totalement proportionnelle à la qualité du travail réalisé pendant les séances de kiné.
La reprise progressive de tous les mouvements est cependant autorisée rapidement, y compris le port de charge d’un poids modeste. En effet la prothèse est d’emblée fixée à son maximum et peut donc être sollicitée sans grosse réserve. Toutefois la cicatrisation de la voie d’abord doit être respectée. Celle-ci se fait en 6 semaines pendant lesquelles il faut éviter toute sollicitation excessive du bras et de l’épaule, en particulier pendant les exercices de rééducation.
Arrêt de travail
L’arrêt de travail après la pose d’une prothèse d’épaule doit respecter le temps de cicatrisation des structures tendino-musculaires qu’il ne faut pas solliciter de façon excessive pendant 6 semaines. Il est cependant possible de reprendre des activités sédentaires dès les douleurs passées. Un délai de 15 jours qui correspond à la date d’ablation des fils et du dernier pansement parait adapté.
La reprise d’activités normales sans grosse restriction est fréquemment prévue à la 6ème semaine. Les travaux de force sont définitivement à proscrire avec une prothèse.
Complications de la prothèse d'épaule
La chirurgie prothétique est une chirurgie orthopédique de l’épaule compliquée et à risque d’accident grave. Elle impose une anesthésie générale qui au-delà de 70 ans est toujours une affaire sérieuse. La mise en place de la prothèse impose une libération importante de l’articulation arthrosique pour la remplacer. La mobilisation des nerfs et des vaisseaux, souvent fragiles du fait de l’âge et de l’enraidissement articulaire, peut les abimer.
Une lésion neurologique est possible et plus souvent transitoire, le nerf fragile ne supportant pas l’étirement. Cette paralysie de l’épaule très handicapante est rarement définitive. Les infections suite à une opération de l’omarthrose sont redoutables et le risque est réel. La prothèse d’épaule est un matériau inerte qui ne se défend pas, contrairement à l’organisme, des microbes de passage. Il est donc important de se mettre à l’abri avant l’intervention par un dépistage et un traitement de tout problème dentaire, ORL et uro-gynécologique car Il faut impérativement éviter les relargages microbiens spontanés à partir d’un foyer septique existant.
La luxation de la prothèse est une possibilité. Elle impose parfois un changement de prothèse pour gagner en stabilité. Enfin avec le temps, l’usure de la prothèse et son descellement sont assez inévitables. Il convient de limiter au maximum et définitivement tout excès de contrainte pour économiser la prothèse et la faire durer le plus longtemps possible.
La liste des complications comme dans toute chirurgie de l’épaule est sans limite, de l’algodystrophie à la capsulite rétractile.
Les complications immédiates pendant et juste après l'opération
Il s’agit des accidents ou incidents qui peuvent émailler la mise en place d ‘une prothèse. Le remplacement de l’articulation nécessite en effet une approche chirurgicale avec dissection ou section d’éléments anatomiques : les nerfs, vaisseaux, os ou tendons peuvent être traumatisés lors des procédures chirurgicales.
Ces complications sont parfois sérieuses et peuvent donner des modifications temporaires (fracture, blessure nerveuse par étirement nerveux) qui sont gérables et améliorables avec le temps, ou des lésions définitives source de séquelles. Toutes ces complications après chirurgie pour une prothèse d’épaule sont statistiquement rares mais inévitables de façon statistique, comme tout accident opératoire.
La traction exercée sur un nerf est nécessaire pour pouvoir luxer l’articulation que l’on doit remplacer. Cette simple manœuvre incontournable peut entrainer une dysfonction du nerf. Celui-ci va être étiré alors qu’il n’a pas été mobilisé pendant longtemps en cas d’arthrose douloureuse et peu mobile alors qu’il devrait glisser. Cette traction peut provoquer une dysfonction du nerf qui n’est pas fait pour supporter un étirement car il n’est pas prévu pour être élastique. On comprend ainsi que certaines paralysies post opératoires puissent être observées sans que cela soit réellement évitable. Ces lésions doivent bien sûr être différenciées d’une section accidentelle du nerf lors de l’intervention qui est beaucoup plus grave et dont le pronostic de récupération spontanée est moins bon.
Il existe sinon tous les incidents moins spécifiques qui peuvent survenir lors d’une opération notamment anesthésique. Les infections pré-opératoires, les raideurs, les luxations prothétiques sont autant de problèmes graves auquel on s’expose lors de cette chirurgie de l’épaule qui reste importante et sérieuse.
Les complications secondaires
Ce sont les complications propres a toutes les prothèses. Avec le temps, celles-ci peuvent s’user, se desceller, s’infecter, favoriser des fractures de l’os autour de la prothèse. Il convient donc de :
- Préparer la mise en place de la prothèse par un bilan à la recherche de foyers infectieux (dentaire, urinaire, …) de façon draconienne pour les éradiquer
- Ne pas solliciter de façon excessive la prothèse par des ports de charge excessif ou des pratiques sportives à risque. Le béquillage est par exemple à proscrire si possible quand on est porteur d’une prothèse d’épaule.
En cas d’usure ou de dysfonction, le changement de la prothèse est envisageable mais reste compliqué. En cas de prothèse anatomique, l’usure de la coiffe des rotateurs est possible entrainant une dysfonction qui peut justifier de la transformation par chirurgie de la prothèse en une prothèse inversée.